Étiquette : éducation

Au fil des pages avec Frankenstein

Pour une lecture commune avec Hilde et Nathalie, j’ai relu Frankenstein ou le Prométhée moderne de Mary Shelley (éd. GF Flammarion, coll. Étonnants Classiques, n°2128, rééd. 2001, 192 pages), un roman fantastique gothique paru pour la première fois en 1818, précurseur de la science-fiction et que j’avais déjà lu il y a bien 25 ans, après avoir vu des adaptations en film, que ce soit celui des années 30 ou celui de Kenneth Branagh dans les années 90.

Au XIXe siècle, lors d’une expédition au pôle Nord, l’explorateur Robert Watson sauve le Dr. Victor Frankenstein, un homme affaibli, délirant, tourmenté et poursuivant un monstre que l’équipage a aperçu quelques jours auparavant sur la banquise. Afin de mettre en garde l’explorateur chez qui il voit la même inclinaison, le docteur recueilli et mourant lui raconte alors le début de sa vie, de sa jeunesse à ses années d’études scientifiques qui l’ont amené à créer un monstre vivant. Le scientifique l’ayant rejetée immédiatement après lui avoir donné vie, la créature le pourchasse, en tuant un à un son entourage familial et amical jusqu’à lui enjoindre de lui créer une femme à son image pour rompre sa solitude et afin d’éviter sa vengeance. Malgré sa lâcheté et ses états d’âme, le Dr. Frankenstein le fera-t-il?

Dans ce récit à la fois épistolaire et à la première personne, la structure en abîme permet de passer d’un point de vue à un autre, celui de l’explorateur puis du scientifique puis du monstre pour revenir à celui du scientifique puis de l’explorateur. Elle reflète ainsi cette spirale de haine meurtrière et de solitude infinie qui consume à la fois le scientifique et sa créature.

Il y est question de la nature humaine, de libre-arbitre, de monstruosité, des apparences trompeuses… La folie créatrice du scientifique apparaît bien plus monstrueuse que la créature à l’apparence hideuse tout comme sa lâcheté, le Dr. Frankenstein rejetant sa création à l’instant même où il la voit prendre vie. De son côté, la créature qui n’aura jamais aucun nom tente de faire voir aux autres au-delà de l’apparence, apprenant à parler, lire et à survivre dans un monde humain qui le rejette. On ressent alors bien plus de compassion à l’égard de la créature que du scientifique.

J’ai apprécié tout autant cette relecture même si différemment  car il y a des thèmes qui prennent une autre importance comme l’éducation et in fine la parentalité ou la Justice, au vu des notions philosophiques étudiées à la fac ou de mon expérience professionnelle. Âgée d’à peine 19 ans lorsqu’elle a écrit ce court roman, Mary Shelley n’en était pas moins cultivée, son récit renvoyant par exemple à des oppositions philosophiques traditionnelles Nature/Culture, Rousseau/Locke ou bien encore à l’essor du tourisme en montagne et des grandes explorations…

D’ailleurs, il y a deux ans, lors du challenge Halloween 2020, j’avais lu L’ombre du Golem d’Éliette Abécassis et Benjamin Lacombe (éd. Flammarion Jeunesse, 2017), un roman illustré à partir de 13 ans. J’avais alors noté les ressemblances entre le Golem et le monstre de Frankestein, tous deux animés par l’argile. De même, m’est venue en tête la citation célèbre de Rabelais, dans Pantagruel: « Science sans conscience n’est que ruine de l’âme ».

Enfin, avec cette relecture, j’ai eu envie de lire des adaptations en BD jeunesse de cette histoire, plus ou moins fidèles: Duckenstein de Bruno Enna et Fabio Celoni (éd. Glénat, 2020, 76 pages) et le premier tome du triptyque Frankenstein de Marion Mousse et Marie Galopin (éd. Delcourt, coll. Ex-Libris, 2007, 48 pages).

Pour d’autres avis sur ce classique: MissyCornish, Hilde et Nathalie.

Participation #21 Challenge Halloween 2022 de Hilde et Lou #Monstre

Participation #15 Challenge 2022 en classiques de Blandine et Nathalie #Classique anglais

Participation #106 Challenge Le tour du monde en 80 livres de Bidib #Angleterre

Orange et Jaune Vilain Mignon Halloween Affiche

Participation #14 Challenge Cottagecore 2022 de MissyCornish #Rêveries au bord de l’eau/Méfiez-vous de de l’eau qui dort

Au fil des pages avec Blanc autour

Le mois dernier, j’ai lu Blanc autour de Wilfried Lupano et Stéphane Fert (éd. Dargaud, 2020, 144 pages), une BD adulte s’inspirant de faits et personnages historiques ayant existé aux États-Unis, 30 ans avant la Guerre de Sécession. En 1832, la jeune institutrice Prudence Crandall décide d’accueillir dans son école pour filles qu’elle dirige à Canterbury, une petite ville du Connecticut, une jeune fille noire, Sarah. Mais encore marquée par une sanglante révolte d’esclaves menée un an plus tôt par Nat Turner, la communauté blanche et raciste va tout faire pour l’en empêcher, même par la violence si la voie légale n’est pas suffisante.

Comme pour Les filles de Salem de Thomas Gilbert, j’en attendais peut-être plus. Graphiquement alors que j’avais été attirée par l’illustration de couverture, j’ai trouvé que les personnages étaient un peu trop similaires et caricaturaux, même si la rondeur des illustrations permet d’atténuer un peu la dureté du propos. J’ai bien plus apprécié l’intrigue autour de cette jeune institutrice altruiste, engagée, courageuse et qui réussira à instiller malgré tout un souffle de liberté et apporter la petite étincelle/lueur d’espoir pour faire évoluer, petit à petit, les mentalités, même si j’ai trouvé que l’introduction de la « sorcière blanche » était peut-être de trop.

Il y est ainsi question du droit à l’instruction, de sororité, d’égalité ou bien encore des droits civiques des Afro-américains qui bien que libres n’étaient pourtant pas égaux… Un bon moment de lecture, l’ouvrage finissant par un postface très intéressant de la conservatrice du Musée Prudence Candall qui revient sur la vie de certains des personnages historiques croisés dans la BD!

Pour d’autres avis sur cette BD: Bidib (et Yomu-chan).

Challenge Petit Bac d’Enna #2 Catégorie Couleur: « Blanc »

Participation #45 Challenge Le tour du monde en 80 livres de Bidib #France

Nos lectures « La Belle et la Bête »

Après avoir lu La Belle et Ganesh lors du RAT des Contes et légendes d’Inde le mois dernier, j’ai eu envie de rédiger un billet thématique sur La Belle et la Bête, le thème du mois d’août du Challenge 2021, cette année sera classique étant « L’Amour ». Finalement je ne fais ce billet qu’en septembre autour de ce conte dont la version la plus connue est celle de Marie-Jeanne Leprince de Beaumont et parue en 1756.

Des versions classiques (texte intégral ou abrégé/adapté):

  • (Recueil de contes) La Belle et la Bête et autres contes

J’ai lu La Belle et la Bête et autres contes (éd. Librio, diff. Flammrion, 2016, 79 pages), un recueil de contes courts et reprenant le texte intégral en commençant par le plus connu de ces contes, La Belle et la Bête.

Un riche marchand, père de six enfants perd toutes ses richesses et part vivre avec eux à la campagne. Un jour, il retourne en ville. Mais en revenant, il se perd et trouve refuge dans un château. Se souvenant que sa fille cadette, Belle lui avait demandé une rose, il en cueille une dans le jardin du château, provoquant la colère de son propriétaire, la Bête. Le marchand l’implore de revoir une dernière fois ses enfants. Pour sauver son père, Belle accepte de vivre auprès de la Bête, malgré sa peur et le dégoût ressenti à la vue de ce monstre. Et si les apparences étaient trompeuses?

Mêlant ambiance surnaturelle et parcours didactique/initiatique d’une jeune femme préparée au mariage, l’autrice apporte une réflexion sur l’Amour, qu’il soit paternel, filial ou marital et partant sur le bonheur et sur ce qu’est une richesse ou bien encore la monstruosité. Elle aborde aussi les thèmes des apparences trompeuses, du mariage, du bonheur et de jalousie (avec les deux sœurs de Belle).

Les contes qui suivent reprennent les mêmes thématiques, en particulier l’éducation de la Vertu au sens du XVIIIe siècle. Étymologiquement associée à des qualités viriles comme le courage et la force morale, la Vertu glisse sémantiquement pour signifier une disposition à faire constamment le bien puis est associée à la femme qui doit être fidèle et chaste au XVIIIe siècle. Elle est le contraire du Vice qui est à proscrire dès le plus jeune âge, dans l’éducation des enfants.

L’autrice était également gouvernante d’enfants de la haute société anglaise. Ce sont des contes moraux où il est question d’éducation des jeunes enfants – fille ou garçon – pour les instruire au mieux selon leur tempérament. Plusieurs des contes mettent scène des jumelles comme dans Belote et Laidronette, la première est si belle qu’elle en oublie de cultiver son esprit et sera aidée par sa sœur pour reconquérir le cœur de son époux. Il est aussi question de distinguer l’amour-passion de l’amour-amitié, la seconde étant à privilégier pour un mariage réussi, la beauté se fanant et l’esprit perdurant. D’autres mettent en scène des jumeaux comme dans Le prince Fatal et le prince Fortuné, les corrections/malheurs subis par le premier afin de remédier à son mauvais caractère de naissance tandis que le second, gâté par la flatterie est devenu méchant alors qu’il était né bon.

  • (Album jeunesse) La belle et la bête de Madame Leprince de Beaumont et Annette Marnat

Après avoir lu La Belle et la Bête et autres contes de Madame Leprince de Beaumont, j’ai enchaîné avec cette version illustrée par Annette Marnat (éd. Flammarion Jeunesse, Père Castor, 2017), un album jeunesse à partir de 5 ans et aux magnifiques illustrations. Le trait délicat et doux d’Annette Marnat accompagne le texte merveilleux où il est question de malédiction, d’amour, de vertu, de jalousie et d’apparences trompeuses. Un très bon moment de lecture!

  • (BD jeunesse) La Belle et la Bête d’Hélène Beney et Dawid

Nous avons également lu La Belle et la Bête d’Hélène Beney et Dawid (éd. Bamboo, 2020) dans la collection « Ma première BD » à partir de 3 ans presque sans texte (à l’exception d’un titre par planche) et qui contient également un petit dossier pour apprendre à dessiner les personnages principaux de l’histoire ainsi qu’une version contée. Les émotions ressenties par Belle qui évoluent au-fur-et-à-mesure de sa relation avec la Bête sont bien rendues, comme celles de la Bête qui se font écho de celles de la jeune femme. Une jolie version pour se replonger dans le conte originel et initiée les plus jeunes lecteurs au format BD!

Des versions revisitées/détournées du conte:

  • (Album jeunesse) La Belle et Ganesh de La Luciole Masquée et Joël Cimarrón

J’avais également lu La Belle et Ganesh de La Luciole Masquée et Joël Cimarrón (éd. Karibencyla, 2009), un album jeunesse à partir de 6 ans et qui est une version revisitée du conte, la Bête étant ici le dieu Ganesh, dieu de la Sagesse et de l’Intelligence accompagné de sa petite souris blanche, Mûshika et le lilas blanc ayant remplacé la rose. J’y retrouve les mêmes thèmes que dans le conte originel, même s’il s’agit avant tout d’amitié que d’amour. Alors que dans l’histoire originelle, les deux méchantes sœurs de Belle font des mariages ratés. Ici, la punition est toute autre et renvoie au folklore hindou. Un bon moment de lecture avec cet album jeunesse aux très jolies illustrations à l’huile! Pour un autre avis sur cet album: Blandine.

Participation #56 au Challenge Contes & Légendes 2021 de Bidib #Conte classique

Participation #22 au challenge 2021, cette année sera classique de Blandine et Nathalie #Conte classique

challenge 2021 lire au féminin

Participation #56 au Challenge Lire au féminin de Tiphanya #Autrice/illustratrice françaises

Participation #7 aux Étapes Indiennes de Hilde et Blandine #Étapes n°6 et 8

Au fil des pages avec Sauvage

Nous lisons Sauvage d’Emily Hugues (éd. Autrement, 2014), un album jeunesse à partir de 5 ans et qui a fait partie de la sélection CP du du 28ème Prix des Incos en 2017. Une petite fille grandit en pleine nature, élevée par les animaux de la forêt qui la protègent. Un jour, des chasseurs la trouvent et la ramènent avec eux. L’enfant sauvage est confiée à un psychiatre et sa femme qui l’adoptent et qui tentent de la réadapter à la vie en société. Mais la petite fille ne rêve que de retourner chez elle. Ne serait-elle pas mieux dans la Nature, comme le chat domestique?

J’avais repéré cet album jeunesse à la médiathèque en ayant été captée par la frimousse de la petite fille sur la couverture. L’histoire se place de son point de vue, son quotidien étant totalement chamboulé par des « bizarreries » que tentent de lui imposer ses parents adoptifs. De petite fille épanouie et heureuse dans la forêt, elle devient apeurée, craintive et malheureuse voire même « monstrueuse ». Elle ne comprend pas ce qu’on attend d’elle. L’autrice interroge sur ce que peut ressentir un enfant en plein apprentissage entre nature/culture, inné/acquis et plus largement sur la question du bonheur, de liberté et du droit à être soi-même. Adulte, nous avons parfois oublié que des choses qui nous paraissent naturelles ont été apprises et répétées maintes fois avant d’être acquises. Un très bon moment de lecture avec cet album jeunesse aux illustrations un brin rétro et au texte court et qui renvoie au mythe de l’enfant sauvage comme Mowgli ou Tarzan ou bien encore d’enfants dits sauvages alors qu’ils étaient en réalité lourdement handicapés et/ou maltraités!

Pour un autre avis sur cet album jeunesse: Bidib.

challenge 2021 lire au féminin

Participation #46 au Challenge Lire au féminin de Tiphanya #Autrice britannique

Challenge Petit Bac d’Enna #11 Catégorie Adjectif: « Sauvage »

Participation #15 au Challenge Cottagecore 2021 de MissyCornish #Retour aux sources

Au fil des pages avec Les amants papillons

Pour Un mois au Japon 2021, je lis un livre que j’avais repéré depuis longtemps, Les amants papillons de Benjamin Lacombe (éd. Seuil Jeunesse, 2007), un album jeunesse grand format pour les 6/9 ans selon l’éditeur mais classé dans la section Ados de notre médiathèque et avec un petit lexique à la fin.

Le jour de ses 14 ans, Naoko est envoyée par son père à Kyoto pour suivre l’enseignement réservé aux femmes (l’art de servir le thé ou de jouer du luth par exemple) et ainsi devenir une femme du monde et une parfaite épouse. Orpheline de mère, Naoko proteste mais avec la complicité de sa servante, elle se déguise en jeune homme pour intégrer une école de garçons et ainsi étudier par exemple la littérature et les haïkus. En chemin, elle rencontre Kamo, âgé de 16 ans. Au fil des mois, Naoko et Kamo deviennent inséparables. Leur relation est presque amoureuse, ce qui trouble Kamo. Mais un jour, Naoko est rappelée auprès de son père pour être mariée.

Il s’agit d’une histoire d’amour tragique magnifiquement illustrée et inspirée d’une ancienne légende chinoise (l’amour impossible de Liang Shanbo et Zou Ingtai) datant du IIIe siècle et qui m’a fait penser pour l’amour impossible à Roméo et Juliette de William Shakespeare ou bien encore pour le travestissement et l’ambiguïté amoureuse à l’anime japonais Lady Oscar datant de 1979/1980. Comme toujours avec Benjamin Lacombe, les illustrations sont magnifiques et aussi délicates que des ailes d’un papillon, sur de grandes doubles pages et subliment une histoire au texte plus classique.

Au-delà de la romance, il est aussi question de la condition de la femme, cette dernière n’ayant pas un égal accès à l’éducation que les hommes et étant soumise à leur bon vouloir, en particulier à celui du père. Un très bon moment de lecture!

Pour d’autres avis sur cet album jeunesse: Blandine, Fondant et Kiona.

Participation #5 Un mois au Japon 2021 de Hilde et Lou #Album jeunesse

Participation #33 au Challenge Contes & Légendes 2021 de Bidib #Légende chinoise

Challenge Petit Bac d’Enna #8 Catégorie Animal: « Papillons »

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