Étiquette : romantisme

Au fil des pages avec Persuasion

Pour la journée « Romantisme » du Mois Anglais 2023, j’ai eu envie de relire Persuasion de Jane Austen (éd. Plume en vol, 2021, 153 pages), roman posthume publié pour la première fois en Angleterre en 1818. Anne Elliot (qui est appelée dans ma version « Anna », ce qui était dérangeant dans ma lecture), désormais une vieille fille âgée de 27 ans, vit paisiblement auprès de son père, un orgueilleux et endetté baronnet et sa sœur aînée tout en se languissant d’un amour passé, celui qu’elle continue de chérir à l’égard de Frederick Wentworth, alors jeune officier de la marine sans fortune et à l’avenir incertain. Elle avait, en effet, 8 ans plus tôt, rompu leurs fiançailles sur les conseils d’une amie de la famille, Lady Russell. En raison d’un travers de fortune, le père d’Anne loue le domaine familial à l’amiral Croft dont l’épouse n’est autre que la sœur de Frederick et se retire à Bath avec sa fille aînée, Elizabeth tandis qu’Anne va chez leur sœur cadette, Mary afin de l’aider dans ses tâches quotidiennes. Frederick revient dans le même temps désormais capitaine, fortuné et à la recherche d’une épouse. Leur amour va-t-il avoir une chance de renaître?

L’histoire fait la part belle à la romance avec Anne, une jeune femme gentille, fidèle, sensible et bien plus intelligente et déterminée qu’il n’y paraît et Frederick qui voudrait bien se convaincre qu’il n’est plus amoureux mais qui ne cesse de rechercher son contact à la moindre occasion. Leur romance « Seconde chance » est douce amère et il est bien sûr question de persuasion dans les choix de vie, en particulier dans le choix d’un mari pour une jeune lady, la force de caractère de tout à chacun, les apparences trompeuses… Est-il possible de faire un mariage d’amour alors qu’à l’époque pullulent les mariages arrangés pour conserver titres et fortune? Le triangle amoureux n’en est pas vraiment un, tant Anne espère – désespère – de pouvoir retenter sa chance avec le capitaine. Elle reste tout au long du roman fidèle à elle-même et à son amour de jeunesse.

D’autre part, derrière la romance, Jane Austen dresse un portrait sarcastique de la vie quotidienne de l’aristocratie et de la bourgeoisie avec leurs vanités, hypocrisies et codes sociaux sous la Régence anglaise, notamment à travers les personnages du père d’Anne, Walter Elliot et sa sœur aînée Elizabeth qui, bien vaniteux, dénigrent les nouveaux riches au nom de l’étiquette et de la supposée suprématie de la noblesse anglaise ou bien lorsqu’elle décrit la vie mondaine bien superficielle à Bath… Le snobisme de la sœur cadette, Mary n’est pas en reste non plus. Il y est question également de la marine britannique – la Royal Navy, l’histoire se déroulant après la défaite de Napoléon.

Le style d’écriture est vif et enjoué, la narratrice omnisciente ajoutant par-ci par-là des petites incursions sarcastiques voire mes cyniques sur les personnages, leurs pensées et leurs modes de vie. Un très bon moment de lecture même si mon préféré de l’autrice reste Orgueil et préjugés!

Petit aparté ciné: J’avais vu il y a longtemps à la télévision le téléfilm britannique d’Adrian Shergold diffusé sur la BBC en 2007. J’ai eu envie de le revoir, étant actuellement en streaming sur Arte avec dans les rôles principaux Sally Hawkins et Rupert Penry-Jones, après avoir été déçu de la dernière adaptation en date, le film de Carrie Cracknell diffusé depuis 2022 sur Netflix avec dans les rôles principaux Dakota Johnson et Cosmo Jarvis. À choisir, il vaut mieux le téléfilm. Malgré un rythme lent et une mise en scène très académique, il est bien plus fidèle au roman et le charme opère entre les deux. Le film est bien trop moderne pour l’époque, Cosmo Jarvis est bien fade dans le rôle du capitaine Wentworth, même si Dakota Johnson tire son épingle du jeu dans un registre plus proche d’une autre héroïne austenienne, Emma. Aucune alchimie ne se dégage du duo. Dans les deux cas, le quatrième mur est régulièrement brisé mais il passe mieux dans le téléfilm car s’appuyant sur des regards de l’actrice et non sur des dialogues simplistes ou bien trop modernes pour une jeune Lady vivant sous la Régence anglaise.

Participation # Le Mois Anglais 2023 de Lou et Titine #Romantisme/Classique anglais

Participation #2 Challenge 2023 sera classique de Blandine et Nathalie #Classique anglais

Participation #7 (Parcours littéraire) Challenge Le tour du monde en 80 livres 2023 de Bidib #Royaume-Uni/Angleterre

Au fil des pages avec Les Hauts de Hurle-Vent

Je lis Les Hauts de Hurle-Vent d’Emily Brontë et illustré par Charlotte Gastaut (éd. L’école des loisirs, coll. Illustrés classiques, 2019), un roman jeunesse à partir de 13 ans et qui est une version abrégée du texte originel. J’avais déjà lu ce classique de la littérature anglo-saxonne paru en 1847 il y a plus de 15 ans, me rappelant le caractère cruel et vengeur de Heathcliff qui en devenant propriétaire des Hauts de Hurlevent en terrifie les occupants encore vivants, après avoir perdu son amour de jeunesse, Catherine.

La narration de l’histoire reprend celle originelle, la vie de Heatchcliff étant racontée par Mr. Lockwood, nouveau locataire de Thrushcross Grange qui la tient lui-même de la vieille femme de charge, Mrs. Hélène « Nelly » Dean ou d’autres domestiques des deux maisonnées. Le lecteur se sent aussi dépassé que Mr. Lockwood lorsqu’il fait la connaissance de Mr. Heatchcliff, un soir de tempête dans les landes et qu’il se méprend sur les personnes présentes dans l’inhospitalière demeure des Hauts de Hurlevent: la jeune femme n’est pas la femme de Heatchcliff mais sa belle-fille Catherine Linton et l’autre jeune homme n’est pas un domestique et encore moins son fils mais son neveu, Hariton Earnshaw. Et comme lui, nous apprenons petit à petit leur histoire emmêlée dans une noirceur étouffante.

Mais que s’est-il passé dans cette campagne anglaise, le destin de deux familles, celles des Earnshaw et des Linton étant effroyablement et inéluctablement lié? Les rares moments de gaieté sont vite rattrapés par la rancune, la folie ou la mort. Il y est question d’amour, de rivalités, de jalousie et de vengeance. Les naissances et les décès s’enchaînent et semblent arriver à point nommé pour permettre à Heatchcliff de réaliser sa terrible vengeance. Le texte est certes abrégé mais ne dénature pas la plume d’Emily Brontë dont c’était le premier et unique roman.

Nous repartons alors dans le passé avec l’arrivée de Mr. Earnshaw aux Hauts de Hurle-vent, revenant de Liverpool un soir d’été avec dans ses bras un jeune enfant d’environ 7 ans, mourant de faim, déguenillé et à l’allure d’un « bohémien » qu’il prénomme Heathcliff. Il l’élève comme son enfant, le préférant à son propre fils plus âgé, Hindley qui en devient jaloux et pour le plus grand plaisir de sa fille, Catherine du même âge que l’enfant recueilli.

Le taciturne Heatchcliff et l’effrontée Catherine, de caractère pourtant si semblable, sont très attachés l’un à l’autre au point qu’ils deviennent amoureux, s’échappant souvent du domaine des Hauts de Hurle-Vent pour gambader dans les landes ou observer leurs jeunes voisins de Thrushcross Grange, Edgar et Isabelle Linton. Cet amour passionné et fusionnel permet à Heatchcliff de ne pas sombrer et de supporter la vie austère qui l’attend depuis le décès de son père adoptif, Hindley le maltraitant sans cesse et le rabaissant à un statut encore plus bas et humiliant que domestique.

Puis les années passent, Catherine choisissant d’épouser Edgar Liton, un riche parti plutôt que Heathcliff avili. Ce dernier, le cœur brisé, s’enfuit et revient quelques mois plus tard plus déterminé que jamais pour anéantir les familles Earnshaw et Linton. Il veut la perte de Hindley pour la maltraitance subie, ce dernier étant devenu veuf, alcoolique et père d’un enfant qu’il délaisse, Hareton et celle d’Edgar pour son mariage avec Catherine. Il récupère à Hindley sa propriété, les Hauts de Hurle-Vent et plus tard, il se marie avec la naïve sœur d’Edgar Linton, Isabelle. 

Il entend ainsi assouvir sa vengeance en rabaissant Hareton de la même façon qu’il l’avait été par Hindley. D’héritier légitime des Hauts de Hurle-Vent, le jeune garçon devient en quelques années un docile domestique inculte. Puis, au décès de son épouse Isabelle qui avait réussi à s’échapper à Londres, il reprend son fils Linton à la santé fragile pour le marier avec sa cousine Cathy, la fille de Catherine morte en couches. Les trois cousins connaîtront-ils les mêmes tourments que leurs parents? Seront-ils à leur tour les funestes objets de Heathcliff dévoré par sa passion vengeresse?

Emily Brontë dépeint ainsi dans son roman une nature humaine bien mauvaise et sombre. Les différents personnages de son roman se font d’ailleurs écho dans une atmosphère oppressante, malgré des différences quant à leur personnalité ou éducation et qui permettront une fin apaisée et qui a été considérée comme audacieuse voire peu respectable des mœurs à la parution du roman. 

Les illustrations de Charlotte Gastaut, avec son coup de crayon si reconnaissable, sont magnifiques. Dans son choix des passages illustrés, l’illustratrice met surtout en avant les personnages féminins de l’histoire, Catherine, Isabelle et Cathy en proie à Heatchcliff. On y retrouve la lande anglaise, terre qui peut se révéler aussi dangereuse que le domaine des Hauts de Hurle-Vent et impétueuse que Heatchcliff. Les moments choisis illustrés se passent souvent le soir, sous couvert de la lumière de la lune. Il s’en dégage un aspect gothique également présent dans le texte d’Emily Brontë, notamment avec l’amour impossible et dévastateur entre Heathcliff et Catherine Earnshaw. Ces derniers forment en effet un couple maudit, le fantôme de Catherine hantant les Hauts de Hurle-Vent et les landes alentour autant que le cœur et l’âme tourmentée de Heathcliff. Une très jolie version du roman d’Emily Brontë!

Participation #16 Challenge A year in England pour les 10 ans du Mois Anglais de Lou, Titine et Cryssilda #Classique abrégé

challenge 2021 lire au féminin

Participation #32 au Challenge Lire au féminin de Tiphanya #Autrice britannique et illustratrice française

Participation #14 au Challenge 2021, cette année sera classique de Blandine et Nathalie #Classique abrégé et illustré

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